Le Petit Paillard
Depuis 1878, le Restaurant Paillard était le rendez-vous de « tous les Parisiens de Paris » de la Belle Epoque et des têtes couronnées. À l’occasion de la restauration du Pavillon Paillard aux Champs-Élysées, Laurent Noët a récemment décrit le décor du plafond de ce restaurant, aujourd’hui connu comme Pavillon Lenôtre-Elysée [1]. Ce pavillon – aussi appelé le Petit Paillard – était une dépendance du restaurant mère de la Chaussée d’Antin, au coin du Boulevard des Italiens (fig. I).
En 1905, Guirand de Scévola reçut la commande de la décoration du plafond de la grande salle de la Chaussée d’Antin [2]. Le projet fut retardé quelques mois à cause d’un incendie dans l’atelier du peintre, qui détruisit plusieurs de ses œuvres, parmi lesquelles l’esquisse et les cartons qui devaient servir à l’exécution du plafond [3].
Enfin, en septembre 1905 le plafond fut marouflé [4]. Pendant les dernières retouches de l’œuvre, l’avis des rares privilégiés qui purent le voir fut unanime : c’était « une merveille de couleur, dont l’effet sera splendide lorsqu’elle apparaitra triomphante, au milieu des lumières », dit ainsi un article du Figaro [5]. La « très parisienne et artistique inauguration » du nouveau plafond eut lieu début octobre 1905. De façons très lyrique, un journaliste du Gil Blas décrivit l’effet de la nouveauté de l’œuvre : le plafond était «le témoin éloquent que 1905 fut an de grâce et de beauté » [6].
À ce jour nous n’avons pas trouvé de photo ou de description précise du plafond disparu. Un dessin des années d’avant la Grande Guerre nous donne une impression de l’intérieur, mais le plafond reste pratiquement invisible (fig. II).
Néanmoins, il semble probable que Guirand ait conçu ses décorations dans la ligne de celles qu’il avait produites l’année précédente pour les décorations murales du foyer du Théâtre Molière à Sète de 1904 (fig. III et IV).
La Femme au vingtième siècle
En ce qui concerne le sujet de la décoration – « la Femme au vingtième siècle » – le journaliste du Gil Blas nous a laissé des indications en mentionnant, plus ou moins clairement, les noms des personnages réels qui y auraient été apparemment représentés.
Ces personnages étaient notamment :
- fig. V) : « de Guestre », « la blonde baronne », « la Curieuse d’Art » ou « la Dame aux bibelots » (la baronne Yele de Guestre) ;
- fig. VI : « le Page de l’Odéon » (l’actrice Valentine Page) ;
- fig. VII : « Lucienne Guett » (l’actrice Lucienne Guett) ;
- fig. VIII : « Cléo » (l’actrice Cléo de Mérode) ;
- fig. IX : « Chavita » (l’actrice Luz Chavita);
- fig. X : « Otéro » (l’actrice Caroline Otéro) ;
- fig. XI : « Claudine » (l’actrice Mlle Polaire), et
- une certaine « Mlle de Sombrero ».
Rik Wassenaar, le 20 mars 2015
Notes
[1] Laurent Noët, « Un vestige méconnu de l’exposition universelle de 1900 : le restaurant Pavillon Elysée et son décor plafonnant », dans Sabrina da Conceiçao ed., Gypseries : gipiers des villes, gipiers des champs, Paris, 2005, p. 191-193, extraits en ligne sur: https://books.google.nl/.
[2] Le Figaro, 7 janvier 1905, p. 1.
[3] Le Figaro, 21 mars 1905, p. 1.
[4] Le Figaro, 29 septembre 1905, p. 1.
[5] Ibidem.
[6] Gil Blas, 11 octobre 1905, p. 1.